L’historien Gérard Crespo nous propose un article sur les Vandales en Afrique du Nord (431-534) en 2 parties.
« Les Vandales, bien que chrétiens, se réclamaient d’un courant schismatique, l’arianisme que l’on doit à Arius théologien né en Cyrénaïque. Selon lui, Jésus n’est pas de la même nature que Dieu; Jésus a été créé ainsi que l’esprit sain, il est temporel et ne peut être de nature divine comme le Père. Cette doctrine s’oppose aux canons du concile de Nicée réuni par l’empereur Constantin en 325, canons qui imposent le dogme trinitaire, c’est à dire la croyance en la Sainte Trinité, » Le Père, le Fils de nature divine et le Saint Esprit ».
Le théologien Arius
L’empereur Constantin
Mais les fils de Constantin, Constance I, Constance II et Valens, tous trois empereurs adhérèrent à l’arianisme. Hors de l’empire, l’évêque goth Wulfila (306-383), aurait été converti à l’arianisme par Eusèbe de Nicomédie et aurait converti les peuples germains à cette doctrine. Il aurait également traduit la Bible en langue gothique et aurait contribué à répandre l’arianisme chez les Ostrogoths, les Burgondes et les Vandales. C’est ainsi que lorsque ces derniers franchissent le détroit de Gibraltar en 428, prennent Hippone en 431, puis Carthage en 439, l’arianisme se répand en Afrique du Nord. Mais en cette contrée, Caecilianus de Carthage de retour en son évêché, vraisemblablement en 326, avait apporté plusieurs exemplaires des canons du concile de Nicée qu’il avait signés et les avait communiqués à tous les évêques africains. Le credo de Nicée est proclamé solennellement au concile d’Hippone en 393 et à celui de Carthage en 397.
Lorsque le roi vandale Genséric envahit l’Afrique du Nord, il se trouve confronté à une Eglise au sein de laquelle les nicéens étaient bien structurés, sûrs de leur bon droit « romain » et imprégnés de la pensée augustinienne. Après la prise d’Hippone en 431, Genséric maître de presque toute l’Afrique du Nord littorale – il n’a pas encore conquis Carthage – fait de la ville de saint Augustin sa capitale. La bibliothèque épiscopale fut respectée et Genséric signa avec l’ambassadeur romain Trigetius, un traité qui faisait du roi vandale, théoriquement un feudataire d’un empereur romain qui n’avait presque plus de pouvoirs. Hippone demeura donc capitale jusqu’à ce que Genséric foula aux pieds le traité et décida d’attaquer Carthage en octobre 439. Leur conquête achevée, bien qu’incomplète – car les terres montagneuses de l’intérieur sont demeurées inviolées – les Vandales réorganisent les juridictions, créent des ateliers monétaires, mettent en place leur administration.
Le vandale Genséric
Site d’Hippone
Saint Augustin par Botticelli
A cette date, Carthage comptait, outre son évêché, 22 grandes églises, 500 prêtres pour une population estimée à 250 000 habitants. Genséric et son fils Hunéric n’eurent donc de cesse de combattre le christianisme qui se réclame du concile de Nicée. Des chrétiens nicéens furent massacrés dans la basilique de Bulla Reggia. Au début de la conquête de Genséric, l’Eglise nord africaine enregistre un de ses premiers martyrs, Pampinianus de Vita1. Les évêques et leurs fidèles « nicéens » sont exilés, condamnés aux travaux forcés, voire exécutés. Pampinien évêque de Vita est supplicié. Possidius de Calama, disciple de Saint Augustin et l’un de ses proches Novatus de Sitifis furent exilés. Il en fut de même de Martinianus et de ses compagnons – des moines – exilés chez le roi maure Capsur qui vivait à l’orée du désert en une contrée nommée Caprapicti2. Mais très vite Martinianus et ses amis se mirent à convertir des Maures en tel nombre que Capsur relata le fait à Genséric qui ordonna qu’ils furent suppliciés; ce qui fut fait.
Site de Carthage
Article très intéressant, merci Monsieur Crespo.